Procès

Dans un ordre secret daté du 14 septembre 1307, Philippe le Bel ordonna l’arrestation de tous les templiers de France, arrestation qui devait avoir lieu le 13 octobre 1307. Cette arrestation fut prise en violation du droit canonique, car les templiers n’avaient pour seule autorité que le pape. Le roi et ses conseillers s’étaient réunis à l’abbaye de Maubuisson, près de Pontoise, le 14 septembre afin de décider si quelque chose devait être fait, et de quelle manière. Les ordres d’arrestation furent rédigés à ce moment, le 14 septembre, et envoyés aux baillis et sénéchaux, avec ordre exprès de ne rien divulguer de cette opération avant le jour prévu.
Philippe le Bel obtient l’aval de Guillaume de Paris, son confesseur et membre de l’Inquisition. Celui-ci n’a pas l’accord du pape, mais le roi espère bien que cet appui suffira. Le pape a donc été entièrement tenu à l’écart de la décision d’arrêter les Templiers, ce qui constituait une violation de ses prérogatives, contre lesquelles la royauté française menait une importante lutte depuis le début du règne de Philippe le Bel. Cela n’empêcha pas Philippe le Bel de prétendre avoir son accord dans l’ordre, bien que Clément V nia ensuite et écrivit une lettre de protestation au roi à la fin octobre.

Il semble que des templiers aient été mis au courant de ce projet, sans qu’aucune mesure soit prise pour éviter l’arrestation. La veille de l’arrestation, le 12 octobre, Jacques de Molay assistait à une place d’honneur aux funérailles de Catherine de Courtenay, épouse de Charles de Valois, le propre frère du roi ; les admissions dans l’ordre n’ont pas cessée au cours du mois précédent le 13 octobre. Mais à ce moment, il n’y avait guère d’alternatives à l’inaction : en effet, si Jacques de Molay a été mis au courant du projet, il n’en a rien montré, car il estimait sans doute que la fuite n’arrangerait pas les problèmes de l’ordre, surtout au moment où lui-même avait réclamé une enquête.
L’ordre d’arrestation précise néanmoins les charges qui pèsent contre l’ordre. Le roi y écrit ne pas y avoir cru dans un premier temps, mais que la profusion des témoignages l’obligeait à enquêter :

« Une chose amère, une chose lamentable, une chose assurément horrible à penser, terrible à entendre, un crime détestable, un forfait exécrable, un acte abominable, une infamie détestable, une chose tout à fait inhumaine, bien plus, étrangère à toute humanité, a, grâce au rapport de plusieurs personnes dignes de foi, retenti à nos oreilles. […] Les frères de l’ordre de la chevalerie du Temple, cachant le loup sous l’apparence de l’agneau et, sous l’habit de l’ordre, insultant misérablement la religion de notre foi (sont accusés de renier le Christ, de cracher sur la croix, et) ils s’obligent, par le voeu de leur profession et sans crainte d’offenser la loi humaine, à se livrer l’un à l’autre, sans refuser, dès qu’ils en seront requis. […] Attendu que la vérité ne peut être pleinement découverte autrement, qu’un soupçon véhément s’est étendu à tous, […] nous avons décidé que tous les membres dudit ordre de notre royaume seraient arrêtés, sans exception aucune, retenus prisonniers et réservés au jugement de l’Église, et que tous leurs biens, meubles et immeubles seraient saisis, mis sous notre main et fidèlement conservés. »
Le nombre des personnes arrêtées est difficile à préciser, car les documents ne les recensent pas avec précision. Les procès-verbaux des interrogatoires de la fin octobre indiquent 138 membres de l’ordre arrêtés à Paris, et 94 en province. La commission pontificale de 1310-1311 interrogea quelque 231 templiers, et on en compte 546 détenus dans une trentaine de lieux en 1310.

Les chefs d’accusations
Lors de l’arrestation, cinq points sont mis en avant
Pendant le rituel d’admission dans l’Ordre, le postulant devait renier trois fois le Christ en crachant sur un crucifix.L’officiant donnait au nouveau templier un baiser au bas de l’épine dorsale.Les Templiers pouvaient pratiquer entre eux la sodomie.Ils vénéraient une idole.Au cours de la messe, les prêtres de l’Ordre omettaient de consacrer l’hostie.Par la suite, ces accusations seront développées et deviendront, selon les procédures, des listes de 86 à 127 articles[3] dans lesquelles seront rajoutées quelques autres accusations, telles que l’interdiction de recourir à des prêtres qui n’appartiennent pas à l’Ordre.